Concile Vatican II

Le Vatican 11 octobre 1962, il est midi lorsque s’ouvre dans la plus grande église du monde le XXI° concile. Mais là n’est pas l’extraordinaire, l’extraordinaire c’est que pour la première fois dans l’Histoire sur les 5 continents des hommes du Christ se sont mis en route. Vous êtes 2500 venant de toute la Terre, vous représentez 79 nations et 500 millions de catholiques, vous figurez l’universalité de l’église ! Rois Mages des temps modernes, vous n’avez pas suivi la marche d’une étoile vous vous êtes mis dans le vent, sous le vent de l’Esprit, répondant à la convocation de votre pasteur Et pourtant il y a des absents : les représentants de l’église bâillonnée, de l’église du silence, celle qui croupit dans les prisons, les asiles d’aliénés, l’église qui accepte d’être humiliée, torturée pour affirmer qu’elle est vivante ! Et c’est vers ces apôtres emprisonnés que vont les premières pensées du Concile.

Alors ne pas s’arrêter à l’encens et à la pompe, ne pas se laisser tromper par la soie et les parures dont vous êtes couverts. Vous en Arménie n’avez vous pas été flagellé entre 2 condamnations à mort ? Quant à vous, il n’y a pas si longtemps encore ne traîniez vous pas un cyclo-pousse quand vous n’étiez pas éboueurs dans les rues d’Hanoï et vous natif d’Albi, évêque à béret basque et salopette, vous bâtissez des écoles et des écoles dans l’enfer vert brésilien. Vous êtes issus de toutes les classes de la société. Vous cardinal Ottoviani, préfet du St Office, qui vous définissez vous même comme le carabinier de l’Eglise, garant de la doctrine, votre père était boulanger. Le votre Cardinal Siri était docker. Et le votre cardinal Kominek était mineur en Silésie. VOUS Frère évêque Ancel n’étiez vous pas ouvrier à bicyclette dans les faubourgs de Lyon ?…

Tous par vos origines, vos couleurs, par vos langues, par votre culture vous êtes la diversité du monde 2500 qui représentez les MILLE et UN visages bariolé du peuple de Dieu !

Tous les peuples forment en effet une seule communauté : ils ont une seule origine puisque Dieu a fait habiter toute la race humaine sur la face de la Terre. Ils ont aussi une seule fin dernière : Dieu dont la Providence, les témoignages de bonté et les desseins de salut s’étendent à tous jusqu’à ce que les élus soient rassemblés dans la cité sainte que la gloire de Dieu illuminera et ou tous les peuples marcheront à sa lumière.

citation du concile

Aussi c’est dans le joie mais emplis d’appréhension devant la tache qui vous attend qu’en long cortège, 6 par 6 -en bon ordre-vous pénétrez sous les hautes voûtes de la basilique. Quant à celui qui vous a convoqués, fils des paysan, à 40 ans il n’était jamais sorti de son diocèse, à 70 il n’était pas encore cardinal, à 76 le voilà élu pape pour faire -pensait-on- ronronner gentiment l’Église durant quelques années.

Mais laissons le se présenter lui même :

je viens de l’humilité, la Providence me fit un beau matin sortir de mon village natal et me fit parcourir le monde en Orient et en Occident, m’amenant à côtoyer des hommes différents par la religion et les idéologies, me mettant face à des problèmes sociaux aigus et menaçants, auprès desquels je gardais le calme et l’équilibre du jugement et de l’imagination, toujours préoccupé davantage par ce qui unit que par ce qui sépare et suscite des oppositions.

Le Pasteur est celui qui va au devant de tous, ouvre la porte, mène vers des pâturages fertiles et donne sa vie pour le troupeau

citation du concile

Voilà récapitulé en peu des mots l’histoire de ce bon vieillard qui décide 90 jours après son élection, à la stupéfaction, voire la stupeur des 16 cardinaux auxquels il a réservé la primeur de la nouvelle, qu’est venu le temps de rendre à l’Église une nouvelle jeunesse qu’il faut en ouvrir toute grande les portes afin qu’elle sorte au dehors qu’elle se rapproche du monde qu’elle se rapproche des Hommes. On comprend mieux alors l’inquiétude qui en ce 11 octobre 1962 étreint la plupart d’entre vous qui, tels des étudiants studieux, avez pris place côte à côte sur les bancs trop étroits de ces deux tribunes dressées face à face tout au long de la nef. Hommes qui pour la plupart bien évidement ne vous connaissez pas et surtout ne vous comprenez pas bien, tout simplement parce que le latin parlé à Honolulu n’est pas le même que le latin de Tombouctou de Sidney ou de Pondichéri. Ce 11 octobre le Concile qui s’ouvre ne devrait selon les plus optimistes d’entre vous ne durer que quelques semaines… au plus tard jusqu’à Noël. Tout a été consciencieusement préparé par la Curie romaine durant deux ans, ne reste plus qu’à entériner… Il durera 3 années !

Aussi quand la chorale de la basilique entonne ce matin comme en un grandiose concert le chant «  Veni Créator Spiritus » c’est chacun d’entre vous dans le silence de votre cœur qui lancez à l’E.S. cet appel

« Viens Esprit créateur visiter le cœur de tes fidèles, viens apporter la puissance du langage »

Esprit de vérité, esprit de lumière descend sur tes fidèles accomplissant en nous ta parole – fais briller en nous ta lumièrerépands l’amour dans nos cœurs – soutiens la faiblesse de nos corps rempli jusqu’à l’intime – le cœur de tes fidèles qu’en nous ta voix résonneà toi nous nous confions

Bienheureux Jean XXIII lorsque vous convoquez le Concile annoncer l’Évangile au monde voilà ce qui vous habite ! L’urgence de la Mission voilà ce qui vous hante réunir les frères chrétiens dispersés voilà ce que vous poursuivez. Une anecdote résume à elle seule ces préoccupations : recevant en audience privée le gendre de Kroutchev, un diable pour l’Eglise d’alors, vous répondez à votre entourage qui s’en étonne, voire s’en émeut :

cet homme à demander à me rencontrer, je sais qu’il est communiste, mais au nom de ma mission je me dois d’accueillir tout le monde

citation du concile

Et voilà que dès les premières heures du concile l’extraordinaire se confirme ! 1000 journalistes venus de toute la planète qui attendent sur la place St Pierre d’être reçus en audience par le pape s’en font l’écho, la nouvelle se répand comme une traînée de poudre dans toutes les salles de rédaction du monde « Il se passe quelque chose d’incroyable à Rome ! »

En effet violant allégrement le règlement établi et remettant en cause l’ordre du jour, vous tous pasteurs rassemblés décidez pour commencer de bouleverser le programme très conservateur fixé par la Curie romaine et dans un élan missionnaire vous adressez un message au monde non pas seulement au monde chrétien, au peuple des baptisés– mais aux hommes du monde entier !

Vous affirmez ainsi que l’Église n’a pas sa fin en elle même mais qu’Elle est pour le bonheur de tous.

parce que le Gloire de Dieu c’est que l’Homme vive !!

parce que la Gloire de Dieu c’est que ‘Homme soit pleinement Homme collant au plus près à l’Image de Dieu !

Voilà pourquoi en affirmant la très noble vocation de l’Homme et en affirmant qu’un germe divin est déposé en lui, ce saint synode offre au genre humain une collaboration sincère de l’église pour l’instauration d’une fraternité universelle qui réponde à cette vocation.

Aucune ambition terrestre ne pousse l’Église. Elle ne vise qu’un seul but : continuer sous l’impulsion de l’Esprit consolateur l’œuvre même du Christ venu dans le monde pour rendre témoignage à la Vérité, pour sauver, non pour condamner, pour servir, non pour être servi.

citation du concile

Dès le début du Concile les dés sont jetés et les 3 années qui font suivre ne vont pas manquer de renvoyer au monde l’image d’une Église bien décidée de rester en phase avec son temps.

Mais quittons le présent et anticipons l’avenir. Au milieu de votre assemblée se lève très vite la haute figure du Christ, le commencement de toute chose, l’alpha et l’oméga. Christ que vous proclamez Lumière des nations et ces nations vous les invitez à recevoir son Évangile : un message fraternel d’Amour de Justice et de Paix. Le Christ ne va cesser d’illuminer le sens du Concile. Le Christ-présent par son esprit au milieu de votre assemblée sera le centre vers lequel tout va converger l’évangélisation n’ayant qu’un but : le Christ, l’Église étant l’Église du Christ, la foi étant la foi au Christ.

Image du Dieu invisible, le Christ est l’Homme qui a restauré dans la descendance d’Adam la ressemblance divine altérée par le premier péché. Parce qu’en lui la nature humaine a été assumée, par le fait même cette nature a été élevée en nous aussi à une dignité sans égal. Car par son Incarnation le Fils de l’Homme s’est en quelque sorte uni lui même à tout homme.
Il a travaillé avec des mains d’homme, il a pensé avec une intelligence d’homme, il a agi avec une volonté d’homme, il a aimé avec un cœur d’homme.

Car le Verbe de Dieu, par qui tout a été fait, s’est lui même fait chair afin que homme parfait, il sauve tous les Hommes et récapitule toute chose en lui. Le Seigneur est le terme de l’histoire humaine, le point vers lequel convergent les désirs de l’Histoire et de la civilisation, le centre du genre humain, la joie de tous les cœurs et la plénitude de leurs aspirations

citation du concile

Voilà le projet du Concile : vous, qui en êtes les acteurs, allez manifester la vie concrète des Hommes dans la lumière du Verbe incarné. L’Homme devient parfaitement lui-même s’il se laisse habiter par le Christ. Au cœur de la Création il y a l’Homme et la chance de l’Homme c’est d’accueillir et répondre à l’invitation du Christ.

Constitué Seigneur par sa résurrection, le Christ, à qui tout pouvoir a été donné au ciel et sur la Terre, agit désormais dans le cœur des hommes par la puissance de son esprit. Il y anime, purifie et fortifie ces aspirations généreuses qui poussent la famille humaine à améliorer ses conditions de vie et à soumettre à cette fin la Terre entière. De tous il fait des Hommes libres pour que, renonçant à l’amour propre et rassemblant toutes les énergies terrestres pour la vie humaine, ils s’élancent vers l’avenir ou l’humanité elle-même deviendra une offrande agréable à Dieu

Ainsi Acteurs du Concile vous témoignerez que de Dieu à nous et de nous vers Lui le chemin est tracé, il porte un nom : Jésus le Christ. Plus qu’un modèle et un guide, Jésus est la présence et l’engagement de Dieu. Il appartient donc à ses disciples de témoigner de ce qui fait la Vérité de cet homme. Si Jésus polémique avec les Pharisiens, s’Il ne se laisse pas enfermer dans les rubriques des légistes – s’Il écarte l’épée et les Zélotes- s’il fustige les marchands du Temple- s’il relève la femme adultère, c’est parce qu’Il est libre de la liberté même de Dieu.

Il n’a point d’autres repères que l’inépuisable miséricorde du Père Il est l’homme qui a pris le risque d’aimer comme seul Dieu aime. Il ne peut aimer le Père sans vouloir faire des tous les hommes un peuple de frères.

L’évangile du Christ est animé d’un esprit qui n’est lié ni à un lieu ni à un temps historique déterminé. L’église du Christ ne se meut pas dans l’ordre des vérités abstraites Non ! Elle se meut dans l’Histoire

Le Concile c’est l’Église en marche l’Église qui se veut cette part de l’humanité qui au cœur de l’Histoire témoigne de la vie de Jésus toujours vivant- cette part de l’humanité qui s’efforce de discerner les signes de la présence et du dessein de Dieu.

à faire partie du peuple de Dieu tous les Hommes sont appelés , c’est pourquoi ce peuple demeurant un et unique est destiné à se dilater aux dimensions du monde entier et à toute la suite des siècles pour que s’accomplisse ce qui est proposé par Dieu en créant à l’origine la nature humaine dans l’unité et décidant de rassembler enfin dans l’unité ses fils dispersés. Ainsi l’unique peuple de Dieu est présent à tous les peuples de la Terre, empruntant à tous les peuples ses propres citoyens. Citoyens d’un peuple dont le caractère n’est pas terrestre mais céleste. Tous les fidèles rassemblés à travers le monde sont en effet dans l’Esprit Saint en communion avec les autres et de la sorte celui qui réside à Rome sait que ceux des Indes sont pour lui un membre. ( L N 13) Si dans l’Église tous ne marchent pas par le même chemin, tous cependant sont appelés à la sainteté et ont reçu à titre égal la foi qui introduit dans la justice de Dieu. Même si certains par la volonté du Christ sont appelés docteurs, dispensateurs des mystères et pasteurs pour le bien des autres, cependant quant à la dignité et l’activité commune à tous les fidèles dans l’édification du corps du Christ règne entre tous une véritable égalité.

Dieu a voulu faire des Hommes des collaborateurs d’un monde qui ne peut s’achever sans eux. Tous créés à l’image de Dieu c’est à dire libres, libres de tous les actes qu’ils posent. Aussi Dieu parle à tout Homme. C’est ce que vous proclamez dans la constitution Joie et Espérance, véritable concordat d’amour entre l’Église et l’humanité.

Au fond de sa conscience l’Homme découvre le présence d’une loi qu’il ne s’est pas donné lui même mais à laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix qui ne cesse de le presser d’aimer et d’accomplir le bien et d’éviter le mal, au moment opportun résonne dans l’intimité de son cœur «  fais ceci, évite cela ». C’est une loi inscrite par Dieu au cœur de l’Homme. La conscience est le centre le plus secret de l’Homme, le sanctuaire ou il est seul avec Dieu et ou sa voix se fait entendre. Par fidélité à la conscience, les chrétiens, unis aux autres hommes, doivent chercher ensemble la Vérité et la solution juste de tant de problèmes moraux que soulèvent aussi bien la vie privée que la vie sociale. Plus la conscience droite l’emporte, plus les personnes et les groupes s’éloignent d’une décision aveugle et tendent à se conformer aux normes objectives de la moralité. Mais c’est toujours librement que l’Homme se tourne vers le bien car Dieu a voulu le laisser à son propre conseil

Seulement voilà ! Cette liberté offerte par Dieu nécessitera parfois de livrer de rudes combats pour s’attacher au bien.
Et devant le monde qui vous observe, vous pasteurs de l’Église, sans vous voiler la face, humblement, oserez réaffirmer les deux réalités de cette Église, sa réalité divine et sa réalité humaine.

Bien que l’Église, par la vertu de l’Esprit Saint, soit restée l’épouse fidèle de son Seigneur et n’a jamais cessé d’être dans le monde le signe su Salut, elle sait très bien toutefois qu’au cours de sa longue histoire parmi ses membres, clercs et laïcs, il n’en manque pas qui se soient montrés infidèles à l’Esprit de Dieu. De nos jours l’Église n’ignore pas quelle distance sépare le message qu’elle révèle et la faiblesse humaine de ceux auxquels l’Evangile est confié.
Quelque soit le jugement de l’Histoire sur ces défaillances nous devons en être conscient et les combattre avec vigueur afin qu’elles ne nuisent pas à la diffusion de l’Évangile. Pour développer ses rapports avec le monde, l’Église sait également combien elle doit continuellement apprendre de l’expérience des siècles.
Guidée par l’Esprit Saint l’Église notre Mère ne cesse d’exhorter ses fils à se purifier et à se renouveler pour que le signe du Christ brille avec plus d’éclat sur le visage de l’Église

L’heure ne sera donc pas aux facilités ni aux inutiles angoisses – l’heure sera à l’effort, à l’audace et aux combats de l’Évangile ! Et comme dans tous combats il y aura des adversaires et des partenaires et Dieu sait si vous allez vous affronter, vous confronter, vous coltiner les uns les autres, vous livrant durant trois années à des combats de l’intelligence sur des sujets sensibles qui vont déclencher de franches résistances

Débats sur la liberté religieuse

Débats sur la responsabilité des évêques et la collégialité

Débats sur le rôle des laïcs

Débats sur les relations avec les autres religions

A notre époque ou le genre humain devient de jour en jour plus étroitement uni et ou les relations entre les divers peuples se multiplient, l’Église examine plus attentivement quelles sont ses relations avec les religions non chrétiennes. Elle examine d’abord ce que les hommes ont en commun et qui les pousse à vivre ensemble leur destinée.

Que de montées aux créneaux par de redoutables combattants qui vont se livrer armés de mots à d’épuisantes batailles de textes !

Prenons un exemple…. au hasard : Tenez VOUS ! Cardinal Ottoviani ! Préfet du tout puissant Saint Office : le gardien du temple en quelque sorte.
Vous serez tout au long du Concile, un des chefs, un des meneurs de la minorité, l’un des empêcheurs de tourner en rond !

Mais grâce à vous, à votre infatigable ténacité vous obligerez la majorité à remettre sans cesse les textes à l’étude, à les retravailler, à les préciser, vous livrant parfois a de véritables batailles de nerfs pour qu’au final ils soient adoptés par tous. Car hommes de la minorité que vous êtes, vous saurez dans l’ensemble loyalement vous incliner accordant votre confiance à l’Esprit Saint

Ainsi Cardinal Ottaviani, à la fin du Concile durant lequel rien ne se passera comme vous auriez aimé que cela se passe, vous déclarerez :

Durant 76 ans j’ai été gardien du dépôt de la foi. Mais si c’est l’Église elle-même qui ré examine, ré approfondit les thèmes, parle une autre langue au service d’une autre manière d’être, Dieu me donnera la grâce d’être aussi fidèle aujourd’hui qu’hier.

Voilà une belle mise en pratique de l’abandon à la Providence…

Ainsi va s’ouvrir à l’Église un chemin d’espérance. De même que l’Amour n’émerge à la vie que le jour ou deux êtres osent se déclarer l’un à l’autre, de même le Christ ne sauve le monde en vérité que le jour ou l’Église risque le Message.

Voilà l’invitation qui résonne encore à nos oreilles 60 ans plus tard

En prêchant l’Évangile, l’Église dispose ceux qui l’entendent à croire et à confesser la foi, elle les prépare au baptême, les incorpore au Christ pour croître en lui par la charité jusqu’à ce que soit atteinte la plénitude Son activité n’a qu’un but : tout ce qu’il y a de germe de bien dans le cœur et la pensée des Hommes, ou dans leurs rites propres ou leur culture, non seulement ne pas le laisser perdre, mais l’élever, l’achever pour la gloire de Dieu et le bonheur de l’Homme.

Pères du Concile durant 3 ans vous allez travailler sans compter au sein de multiples commissions. Le cap est fixé, vous l’avez précisément défini.

Il faut donner à l’Église un heureux élan dont bénéficient les valeurs d’humanité

Ainsi vous Dom Helder Camara, évêque de Récif au Brésil, l’apôtre des pauvres qui n’hésitez pas à qualifier le sous développement « d’insulte à la Création », vous proclamerez que cette Église n’est pas une hiérarchie ni une addition d’individus, mais qu’elle est un collectif, une communion ; elle est le peuple des croyants.

Ce peuple de Dieu fait de F et d’H qui partagent la condition humaine ; ils ont eu la chance de rencontrer Dieu, de renaître de son Esprit dans l’eau du baptême, ils accueillent ce don dans l’humilité et la reconnaissance. C’est pourquoi ils doivent partager avec tous, sans discriminations et sans suffisance ce qui fait la trame de la vie quotidienne.

Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des Hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur.
La communauté des chrétiens se reconnaît donc réellement et intimement solidaire du genre humain et de son histoire

L’Église c’est donc le peuple de Dieu

Être en Église c’est finalement toujours se prendre un peu pour Jésus Christ ! C’est avec lui et en lui reconnaître que Dieu veut faire de nous des vivants, des ressuscités…

Ressusciter qu’est ce que c’est ??? si ne n’est vivre déjà comme des vivants revenus de la mort !

Tout n’est sûrement pas encore réalisé aujourd’hui mais pourra l’être demain ! C’est pourquoi ce peuple messianique, bien qu’il ne comprenne pas encore effectivement l’universalité des Hommes et qu’il garde souvent l’apparence d’un petit troupeau, constitue cependant pour l’ensemble du genre humain le germe le plus fort d’unité d’espérance et de salut

Ce peuple des baptisés a reçu des apôtres les témoignages de la Parole de Dieu au milieu des Hommes

Vous, apôtres du Christ pour aujourd’hui, frères de Jésus-Christ, vous allez décider de confier aux clercs comme aux laïcs la mission de transmettre aux Hommes au milieu desquels ils vivent le message d’Amour de Dieu, vous inviterez les chrétiens à se donner au monde et être à la hauteur de ce qu’ils ont reçu.

Par son apostolat, l’Église et tous ses membres doivent donc d’abord adresser au monde le message du Christ par leurs paroles et leurs actes et lui communiquer sa grâce. Cela s’accomplit principalement par le ministère de la Parole et des sacrements

Cet apostolat ne consiste pas seulement dans le témoignage de la vie : le véritable apôtre cherche des occasions d’annoncer le Christ par sa parole, soit aux incroyants soit aux fidèles pour les instruire, les fortifier les inciter à une vie plus fervente. Confié spécialement au clergé, il comporte pour les laïcs un rôle propre de grande importance. Dans ce domaine surtout l’apostolat des laïcs et le ministère pastoral se complète mutuellement.

Vous tous acteurs du Concile allez devoir mener à bien une lourde tâche une tâche qu’en ce 11 octobre ne soupçonnez pas encore, une tâche qui par moment va vous remplir d’inquiétude

En effet l’Église de Vatican 2 va décider «d’aller au monde» et elle va découvrir « un partenaire à la fois séduisant et terrifiant » et pourtant l’Église dorénavant ne voudra plus se penser comme une « contre société » mais elle se voudra davantage « au monde » : présente au monde, ouverte au monde, accueillante au monde

L’Église n’est pas hors du monde, elle ne fuit pas l’Histoire, elle y participe, les chrétiens ne sont pas des spectateurs dociles ou des marginaux souriants, ils sont citoyens du monde à part entière, ils y sont présents malgré les tempêtes , à cause des tempêtes car ils ont mission de la part de Dieu de servir l’Homme

L’Église est cette part de l’humanité qui au creux des efforts des Hommes, de leurs espérances, parfois de leurs échecs, reconnaît le Royaume qui vient. Elle est le peuple de ceux qui prient « que ton règne vienne » 

Et pour qu’il vienne ce règne, il faut d’abord que tous ceux qui se réclament du Christ se réunissent, se retrouvent.

Alors tournons nous vers vous, MAXIMOS IV. Vous êtes né en Syrie. Vous avez été élu patriarche d’Antioche et de tout l’Orient, d’Alexandrie et de Jérusalem, héritier direct de l’Église primitive vivant au milieu d’un monde musulman dont vous partagez la Culture, l’Histoire et le destin, vous allez contribuer -d’une façon décisive à l’avis de tous- à l’élaboration et à la marche du Concile.
Vos interventions en français et non pas en latin la langue officielle du concile, notons le pour la petite histoire, vos interventions détermineront l’adoption de maintes réformes, en particulier celle du choix des langues vivantes dans les célébrations liturgiques, la concélébration et la marche vers l’œcuménisme

l’unité chrétienne est devenue notre préoccupation première, notre obsession une unité plurielle englobant tous les peuples et tous les rites. Étant donné qu’aujourd’hui en diverses parties du monde sous le souffle de l’Esprit beaucoup d’efforts s’accomplissent par la prière, la parole et l’action pour arriver à la perfection de l’unité voulue par le Christ, le Concile exhorte tous les fidèles catholiques à reconnaître les signes des temps et à prendre une part active à l’effort œcuménique. Ainsi en premier lieu tout effort devra être accompli pour éliminer les paroles, les jugements et les faits qui ne correspondent ni en justice ni en vérité à la situation des frères séparés et contribuent à rendre plus difficile les relations entre eux

Ainsi voilà que vous prélats de tous les continents de toutes les langues , de toutes les couleurs prendrez conscience du scandale que représente la division des chrétiens et allez reconnaître dans le mouvement œcuménique un signe de l’Esprit.

C’est enfin vers un autre des grands acteurs du Concile qu’il faut à présent se tourner vers vous : Cardinal Béa ! De 78 à 84 ans vous avez parcouru plusieurs fois le tour du monde et ceci afin de lancer des ponts entre les chrétiens des différentes communions et travailler à reconstruire l’unité.

Vous êtes ainsi parvenu à associer comme observateurs à tous les débats du Concile nos frères séparés qui étaient jusqu’alors qualifiés d’hérétiques mais vous n’en êtes pas resté là. Vous avez aussi travaillé à édifier des passerelles avec les religions non chrétiennes, enfin, vous n’avez pas ménagé vos peines et négocié jusqu’à l’épuisement pour que puisse se rétablir avec nos frères juifs un dialogue respectueux et constructif.

Du fait d’un si grand patrimoine spirituel commun aux chrétiens et aux juifs, le Concile veut encourager et recommander entre eux la connaissance et l’estime mutuelle

En, outre l’Église qui réprouve toutes les persécutions contre tous les hommes quels qu’ils soient, ne pouvant oublier le patrimoine qu’Elle a en commun avec les juifs et poussée non pas par des motifs politiques, mais par la charité religieuse de l’Évangile, déplore les haines, les persécutions et toutes les manifestations d’antisémitisme

On ne peut terminer cette évocation sans rendre hommage à Paul VI qui aura eu le courage de poursuivre l’œuvre entreprise par son prédécesseur

Le 5 décembre 1965 il conclut Vatican 2 proclamant l’Eglise servante du genre humain, affirmant que le Concile a su donner un enseignement simple neuf et solennel pour apprendre à aimer l’Homme afin d’aimer Dieu.